mercredi 30 janvier 2008

Se représenter soi-même au criminel et au pénal : 1- Avant le procès

Lorsqu’une personne est poursuivie au criminel et au pénal, la nécessité qu’elle a d’être représentée par un avocat est encore plus grande qu’au civil. En effet, les répercussions sociales et économiques, qu’une condamnation au criminel et au pénal peuvent avoir sur son existence, sont très souvent plus importantes que celles de perdre une cause au civil, surtout si elle écope d’un casier judiciaire (pour une infraction au criminel, pas au pénal).








L’auteur de ce blog ne prêche pas pour sa paroisse : il ne pratique pas en droit criminel et pénal.

Nous vous avons présenter dans les textes précédents du blog des moyens qu’a une personne de se représenter elle-même, seule, sans avocat, devant les tribunaux dans des causes de droit civil. Nous avions au préalable, dans un texte antérieur, pris soin d’expliquer les inconvénient de se présenter seul devant un tribunal.

Nous ne fournirons pas autant de conseils dans les deux premiers textes que nous consacrons au procès au criminel et au pénal, que dans les textes portant sur les procès en droit civil. Nous allons surtout montrer les erreurs que risquent de commettre les personnes accusées au criminel ou au pénal qui se représentent elles-mêmes, sans avocat. Ainsi que les inconvénients auxquels elles s’exposent. Nous fournirons, quand même, des conseils dans notre troisième texte sur les procès criminels et pénals.


Montrer à une personne les erreurs qu’elles risquent de commettre, c’est déjà d’une certaine façon la conseiller : c’est l’avertir qu’elles risquent de faire telles fautes précises à telle ou telle étape de son procès. C’est aussi l’aider à comprendre pourquoi nous lui recommandons fortement, si elle n’a pas les moyens financiers de retenir les services d’un avocat pour l’ensemble de son procès, dans consulter un à l’occasion, surtout au début, ce qui lui coûtera nettement moins cher. Cet avocat pourra la renseigner sur les erreurs les plus graves qu’elles risquent de commettre et lui dire en gros ce qu’elle quoi faire à telle étape ou sur tel sujet de son procès.




La complexité

Quasiment aucun accusé, dans une cause criminelle ou pénale, qui se présente devant un tribunal sans avocat ne commet pas d’erreur par action ou par omission, faute qui le désavantage nettement. Le niveau de compétence nécessaire pour éviter tout désavantage dépasse largement les capacités d’à peu près tous les accusés non représentés, et cela vaut pour toutes les étapes du processus judiciaire pénal

Il est vrai que quelques accusés non représentés par un avocat sont assez bien organisés. Cependant, la majorité d’entre eux n’ont pas la moindre idée de ce qui se passe réellement au cours du processus judicaire.

Ils ne comprennent pas comment se déroule un procès, la marche à suivre, les procédures et les formalités à remplir. Ils ne savent généralement pas quels éléments sont de preuve pertinents par rapport aux chefs d’inculpation retenus contre eux. Ils ne savent pas, non plus, comment poser les questions ni quelles questions poser aux témoins, etc.

C’est donc dire qu’ils sont incapables de formuler et d’appliquer des stratégies juridiques valables.



Les erreurs courantes du début

La plupart des accusés non représentés ne savent pas si et quand ils doivent plaider coupable ou non coupable. Lors de sa première comparution devant le tribunal, on indique à l'accusé l'inculpation dont il est l'objet (on lui indique de quel crime ou infraction dont il est accusé). S'il ne la comprend pas, il doit demander au juge de la lui expliquer. Une fois que l'accusé connaît l'inculpation retenu contre lui, on lui demande s'il plaide coupable ou non coupable. S'il plaide non coupable, le juge va fixer la date de son procès.


Une autre erreur grave, qui est commise par certains accusés, est qu'ils ne comparaissent pas dans leur cause et ne réalisent pas les conséquences que cela pourra avoir pour eux. Cela pourra, par exemple, les priver de la possibilité d'être libéré sous caution. Selon les cas, le juge pourra aussi tenir leur procès en leur absence ou ordoner à la police de vous retrouver et de vous arrêter, etc. Il est donc important de comparaître quand on est accusé au criminel ou au pénal. C’est un premier conseil. Comparaissez !

La plupart de ces accusés ignorent également qu’ils ont le droit qu’on leur communique, avant le procès, la preuve que l’on détient contre eux. Par conséquent, deuxième conseil qui leur est donnée : demandez qu’on vous transmettre cette preuve. Et troisième conseil, examinez là !

La Couronne (c'est-à-dire le poursuivant ou la poursuite) prépare un dossier sur l'accusé qui contient les renseignements qu’il utilisera pour établir sa preuve contre cet accusé. Ces renseignements sont constitués de tous les éléments de preuve qui ont été recueillis au cours de l’enquête policière; notamment une copie de toutes les déclarations (c’est-à-dire de toutes les descriptions écrites ou verbales des événements
que les témoins ont données à la police) et un résumé du contenu des dépositions probables des témoins de la poursuite.

Avant un procès criminel, l’accusé a le droit d’examiner tout le dossier de la Couronne (sauf quelques exceptions) avant de décider du plaidoyer qu’il présentera.



La demande de libération

Certains accusés ne retiennent pas les services d'un avocat tout simplement parce qu'ils sont pressés de plaider en faveur de leur libération.

D’autres plaident pendant leur enquête sur le cautionnement sans avoir pris connaissance de la preuve recueillie contre eux. Si vous n’examinez pas cette preuve vous plaiderez presque à tout coup n’importe quoi.

Quand on leur offre une remise en liberté, la plupart des accusés non représentés acceptent sans discuter les conditions qui leur sont imposées pour leur libération. Or, celles-ci peuvent être irréalistes compte tenu de la situation particulière de certains de ces accusés. Par exemple, s’il y a une ordonnance d’interdiction de communiquer avec votre conjoint qui est attaché à votre remise en liberté, que ferez-vous si pour la garde de vos enfants vous devez, dans les faits, rentrer en contact avec lui ?



La déjudiciarisation

Un individu qui se représente lui-même ignore très souvent qu’il peut parfois demander à ce que son cas soit déjudiciariser, c’est-à-dire qu’une dénonciation ne soit pas déposée contre lui.

Cette possibilité est toutefois plus une exception qu’une règle. Ne peuvent en profiter que ceux à qui on ne peut reprocher qu’un écart de conduite isolé relativement peu grave (en comparaison de d’autres infractions), qui ne risquent pas de récidiver (de commettre d‘autres infractions), et qui ne possède pas d’antécédents judiciaires significatifs (autrement dit, qui ne se sont pas rendus coupables de d’autres infractions dans le passé).

C’est le procureur de la couronne qui prend la décision à ce sujet. Il a la discrétion de le faire. Il n’y est pas obligé. Il va tenir compte de plusieurs facteurs pour juger chaque cas.



Plaidoyer

Un nombre appréciable de gens qui sont accusés au criminel ou au pénal, et qui se représentent seuls, plaident coupables soit à tort, soit beaucoup trop tôt dans le processus judiciaire, ou encore bien inutilement. Plaider coupable pour en finir au plus tôt est la dernière chose à faire. Plaider coupable parce qu’on n’a pas obtenu de libération sous caution, et que l’on veut aussi sortir de prison au plus vite, est aussi la dernière chose à faire.

Il se peut que ces gens avaient des moyens de défense valable à faire valoir, mais ils s’en sont privés en plaidant coupable dès le départ. Il est vrai que souvent ces mêmes gens ignorent les moyens dont ils disposent pour se défendre.



Vous ne devez certainement pas plaidé coupable avant d’avoir pris connaissance de la preuve qui a été accumulée contre vous. Et c’est une autre erreur que commettent les personnes non représentées : ne pas analyser la preuve.

Malheureusement, ces gens ne sont pas en mesure de bien évaluer le dossier présenté par le procureur du ministère public, faute de connaissances suffisantes.


De plus, les personnes sans avocat demandent rarement le retrait de certaines accusations qui sont portées contre eux, même s’ils le devraient. Si certaines accusations portées contre une personne sont valables, les autres ne le sont pas forcément. Trop d’accusations peuvent être portées contre une personne. Certaines ne sont pas réellement soutenues par la preuve.


Une autre des pires erreurs, que commettent ces personnes, c’est d’ignorer la peine qui est habituellement imposée pour l'infraction ou les infractions qu’elles ont commises, et ne pas chercher à s’en informer. Il faut absolument se renseigner à ce sujet ! On ne va pas plaider coupable comme cela, sans savoir si on risque ou non une peine de prison importante !


Par ailleurs, trop de gens qui se représentent eux-mêmes ne pas comprennent pas les graves conséquences qu'une condamnation peut avoir sur leur vie. Si d’autres accusations sont portées contre eux à l’avenir, ils pourront plus difficilement obtenir une libération sous caution, la peine qui leur sera imposée risque d’être nettement plus lourde, etc.


D’autre part, une condamnation au criminel et un casier judiciaire n’aident personne à se trouver un emploi.


Pour finir, il faut savoir que plaider coupable « avec explications » comme le font certaines personnes, en pensant qu’en s’expliquant ils vont améliorer leur sort, c’est plaider quand même coupable. C’est reconnaître que l’on a commis l’infraction qui nous est reprochée. Cela ne nous rend pas moins coupable. On est coupable ou on ne l’est pas. Si vous avez « des explications », c’est peut-être que vous aviez une défense. Et que malheureusement vous venez de la réduire en poudre en plaidant coupable.


Il se peut aussi que vos explications, même si elles ne vous rendent pas moins coupables, démontrent que vous devez bénéficier de circonstances atténuantes qui influenceront sur la détermination de la peine qui vous sera infligée. Vous devez alors les mentionner et les prouver au stade des représentations sur sentence, qui est une étape qui vient seulement après un plaidoyer de culpabilité ou le prononcé d’une sentence.